Le mode de facturation au forfait, c'est un peu le rêve de tout le monde dans le digital (et dans le monde tout court d’ailleurs) : une gestion financière limpide, un paiement sans mauvaise surprise, avec un périmètre et des résultats bien définis, et pour le client et pour le prestataire (et pour le projet). Mais, comme souvent, derrière cette belle promesse, la réalité du bonheur est un peu plus nuancée.
Oui au paiement au forfait !
Prenons un contrat de petit projet, comme la création d'un site vitrine.
Ici, le périmètre du service est généralement clair et limité : quelques pages types, une charte graphique définie, un nombre limité de révisions, des photos sélectionnées, un peu de contenu et de SEO. Ces éléments sont assez prévisibles et le temps de production très court, ce qui permet une estimation précise du travail à réaliser et du devis à fournir pour cette prestation.
Dans ces conditions, le mode de facturation au forfait est non seulement pratique mais aussi économique, car il offre une gestion simplifiée et un contrôle des coûts pour le client, les factures sont prévisibles et fixes. Tout le monde peut en sortir gagnant, le client, le prestataire et le projet !
Non au paiement au forfait et oui au temps réellement consacré au projet !
Cependant, quand on s'attaque à des services ou projets plus ambitieux, la donne change pour la facturation. Ces projets sont souvent synonymes de prestation impliquant des mois de développement, avec une phase de conception et des développements itératifs. Ils nécessitent une interaction constante avec les utilisateurs, une gestion de projet souple pour les clients et les équipes, des tests réguliers, …
Les méthodes agiles, qui se caractérisent par une plus grande souplesse de gestion de projet, améliorent de 64% la gestion des changements de périmètre au sein d’un projet !
Par exemple, prenons une prestation de développement d'une application mobile complexe ou d'un outil de gestion interne pour une entreprise, celle-ci peut commencer avec un ensemble de fonctionnalités prévues, mais au fur et à mesure des tests et des retours utilisateurs, certaines de ces fonctionnalités peuvent s'avérer inutiles, tandis que de nouvelles idées et solutions émergent.
Les études sont de plus en plus nombreuses à démontrer qu’une grande partie des éléments prévus dans les cahiers des charges initiaux s'avèrent inutiles ou tout simplement abandonnés au final, nécessitant des ajustements permanents du projet et donc du devis s’il y en avait un.
La montée en puissance des méthodes agiles ces dernières années n’est pas un hasard, elle répond justement à cette réalité.
C’est pas nous qui le disons, mais bien les chiffres ! Les projets menés en méthodes agiles ont 60% de chance en plus de réussir que ceux en méthodes traditionnelles !
Et puis que dire de la dépendance à des outils et solutions tiers, inévitable dans tout écosystème IT. Là encore, les interconnexions sont aussi nombreuses qu’ imprévisibles et représentent des coûts élevés. Chaque intégration peut varier considérablement en termes de complexité et de temps d’échange, en fonction des spécificités techniques et des exigences de chaque outil.
Par exemple, dans le cas d'un projet d'outils métiers spécifiques à une entreprise ou de service de plateformes e-commerce ambitieuses, les interconnexions nécessitent une quantité importante d'échanges et d'adaptations, rendant toute estimation forfaitaire tout simplement impossible.
Des couacs considérables
Les prestataires sont très nombreux à s’en plaindre et à admettre que le mode de facturation au forfait est souvent synonyme de combat avec leurs clients, à travers des avenants et des solutions de négociations pénibles sur le périmètre, de véritables gouffres de temps et d'énergie, là encore au détriment du projet, et de la relation client...
Une étude menée par Standish Group a démontré que les méthodes agiles permettent une meilleure prédiction des délais de 79% supérieure aux méthodes traditionnelles, pas mal non ? Et c’est pas fini !! En méthodes agiles, on note une réduction des risques dans les projets de 76%, normal puisqu’on fait un suivi régulier !
Sans oublier qu’ils se retrouvent à devoir pressuriser leurs équipes, fournir un travail supplémentaire non rémunéré pour respecter les engagements pris, ce qui affecte leur rentabilité, voire remet carrément en cause la pérennité de leur entreprise.
Mais le plus triste c’est qu’ils le disent encore assez peu ouvertement, par peur de rater la prestation, de froisser leurs clients et de risquer de les perdre.
Alors pour minimiser les pertes dues au paiement, certains peuvent être tentés de bâcler le projet, d’affecter des ressources moins expérimentées, comme des services de juniors ou des stagiaires, ce qui n’est pas sans conséquence sur la qualité et les délais du projet. Ils peuvent aussi ré-utiliser des développements déjà produits pour d’anciens clients, même s’ils ne correspondent pas toujours au besoin, le client ne le verra pas forcément, ou du moins pas tout de suite.
Et puis si la situation financière devient trop précaire, les factures trop élevées, les paiements trop déséquilibrés, le prestataire peut aller jusqu’à envisager d'abandonner le projet, laissant le client dans une situation difficile, avec un service incomplet.
Le Zoli mot de la fin
En conclusion, alors que le mode de facturation au forfait peut fonctionner pour des projets simples et bien définis, il est de moins en moins adapté pour des projets plus grands et plus complexes. Le secteur évolue, avec des entreprises cherchant des solutions numériques plus personnalisées et agiles, le mode de facturation doit donc lui aussi évoluer et s'adapter.
Ces besoins spécifiques requièrent une approche plus flexible que celle offerte par la facturation au forfait. Il existe certes des solutions de facturation intermédiaires, à mi-chemin entre les factures forfait et agilité, mais pour les projets ambitieux, le mode tout au forfait n'est pas la bonne solution, ni pour le projet ni pour le client.
Opter pour une facturation au forfait dans de tels cas reviendrait à accepter une relation où il y a un gagnant et un perdant, ce qui n'est pas une approche vertueuse pour une collaboration fructueuse et durable entre clients et prestataires !
On le sait, cela peut vous paraître compliqué à comprendre en tant qu'étranger à ce système de paiement, mais pour nous, vous l'aurez compris, c'est la solution de facture la plus viable pour toutes les parties prenantes d'un projet !